Dr Anne LOMBES

La localisation de la chaîne respiratoire dans la membrane interne mitochondriale, au sein d’un compartiment subcellulaire très cloisonné, rend difficile son analyse biochimique.

Cette difficulté est reflétée par la diversité des techniques biochimiques employées dans le diagnostic des déficits de la chaîne respiratoire associés aux maladies mitochondriales humaines.

L’analyse polarographique…

… consiste à étudier la consommation d’oxygène, en présence de différents substrats.

Elle représente donc une approche plutôt globale de la chaîne respiratoire. Elle permet également l’analyse en amont de la chaîne respiratoire, ce qui peut être très utile pour le diagnostic différentiel de certaines maladies métaboliques proches. Les méthodes polarographiques ont cependant un certain nombre d’inconvénients, qui sont la nécessité de travailler sur un prélèvement tissulaire frais, la difficulté relative de la préparation tissulaire qui peut être la source d’erreurs dans les résultats et, enfin, la possibilité de sélection d’une sous-population de mitochondries qui peut ne pas être représentative de l’ensemble des mitochondries du tissu étudié.

Les techniques spectrophotométriques…

… permettent d’analyser les activités de chaque complexe de la chaîne respiratoire.

Les techniques histochimiques…

… sont l’équivalent histologique des techniques spectrophotométriques.

Elles s’appliquent essentiellement au tissu musculaire et seulement à 3 segments de la chaîne respiratoire : la portion succinate déhydrogénase du complexe II, le complexe IV (ou cytochrome c oxydase) et le complexe V. Elles ont l’originalité, par rapport aux autres techniques biochimiques, de renseigner sur la répartition tissulaire d’un déficit qui peut être diffus (atteinte associée des fibres musculaires, des fuseaux neuromusculaires, des vaisseaux et/ou des nerfs intramusculaires), localisé à un seul des ces tissus ou encore mosaïque (ne touchant que certaines fibres du tissu musculaire).

L’aspect de mosaïque peut être interprété comme le signe d’une population cellulaire également mosaïque sur le plan génétique, ce qui est réalisé dans le cas d’une population hétéroplasmique de l’ADN mitochondrial.

Les résultats des différentes techniques enzymologiques ne sont pas toujours superposables.

Certains déficits ne seront visibles qu’en spectrophotométrie, car ils sont trop partiels pour entraîner une baisse significative de la consommation en oxygène mesurée par la polarographie.

De nombreux déficits mosaïques sont évidents en histochimie, mais ne donnent pas d’anomalies dans les analyses spectrophotométriques ou polarographiques, au cours desquelles l’ensemble du tissu est étudié. Le type de matériel tissulaire utilisé entraîne une cause supplémentaire de diversité, qui complique encore la comparaison des résultats d’analyse.

En conclusion :

Lorsqu’il existe un déficit sévère et/ou isolé d’un seul complexe de la chaîne respiratoire, il y a peu de problèmes diagnostiques, car le déficit s’exprime clairement quelles que soient les techniques ou les préparations tissulaires utilisées. La seule difficulté est la nécessité d’étude du tissu malade (qui peut être difficilement accessible).

Par contre, les déficits partiels et/ou combinés de plusieurs activités de la chaîne respiratoire peuvent poser de nombreux problèmes quant à leur signification. Lorsqu’ils ne sont visibles que par une seule des techniques d’analyse ou dans un seul type de préparation tissulaire, on doit toujours se poser la question de l’authenticité du résultat. La répétition de l’analyse n’est pas toujours possible faute de matériel ou du fait de la nécessité d’un tissu vivant. Lorsque les déficits sont combinés, le problème d’un défaut de conservation du tissu doit toujours se poser et peut être très difficile à éliminer.

Enfin, lorsqu’un déficit est identifié, il confirme le diagnostic de maladie mitochondriale. Il ne permet pas cependant pour autant d’identifier la mutation sousjacente, qui peut toucher n’importe laquelle des nombreuses protéines impliquées dans l’activité mesurée.

< Le Dr Anne Lombès (Institut de Myologie) lors de sa présentation, le 19 juin 1999.